Projet de loi ASAP : une nouvelle loi qui sert le capital et porte clairement atteinte à l’environnement et à la démocratie (21/09/2020)

mercredi 21 octobre 2020

Projet de loi ASAP (accélération et de simplification de l’action publique) : la déréglementation et la dérégulation à tout va sont mises à l’honneur dans le texte, avec plusieurs amendements du gouvernement pour enfoncer le clou ! (amendements exonérés de l’avis du Conseil d’État pour validation juridique et d’étude d’impact)

Le Projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique (ASAP) a été adopté à main levée par le Sénat, en première lecture le 5 mars 2020. Il a ensuite été renvoyé à la Commission spéciale de l’Assemblée Nationale qui a entamé son examen le 14 septembre. Le texte sera examiné à compter du lundi 28 septembre en séance publique.

La déréglementation et la dérégulation à tout va sont mises à l’honneur dans le texte, avec des amendements du gouvernement (au nombre de 20 au 11 septembre) pour enfoncer le clou ! (sachant que les amendements déposés par le gouvernement sont exonérés de l’avis du Conseil d’État pour validation juridique et d’étude d’impact)

Ce projet présente une série de mesures qui, sous couvert de simplification, allègent les obligations et réglementaires environnementales.
L’exécutif ne cesse d’entonner que l’efficacité du plan de relance est conditionnée à la transformation de l’action publique, mettant ainsi la pression sur les députés. Cette justification n’est pas recevable pour la CGT ! Depuis des années les gouvernements successifs suppriment des postes de fonctionnaires, diminuent les moyens des services et ensuite « réorganisent » les administrations de l’État, en les regroupant pour faire des économies. Ce gouvernement poursuit ses politiques régressives après la crise sanitaires, loin de toute remise en cause d’un système qui a pourtant montré les preuves de sa défaillance.
Pour mémoire :
- 4ème CITP du 15 novembre 2019 : poursuite des mesures destructrices >
- Deux circulaires mortifères : la destruction et la privatisation des services de l’État sont « en marche » (circulaires du Premier ministre en date du 24 juillet 2018)
- Loi É.L.A.N. du 23 novembre 2018 : une attaque frontale contre le logement social et contre les acquis environnementaux (réduction des normes, remise en cause des fondamentaux de loi SRU, incohérence des territoires....)
- "Re-Action Publique 2022 - Analyse du SNPTAS CGT

La destruction des Services publics, du statut du fonctionnaire et les pouvoirs croissants donnés aux préfets, mettent en péril la capacité d’intervention et de régulation de l’État, notre environnement et notre santé. Pour la CGT ce projet de loi est abject et va à contre-sens du progrès social. L’aménagement du territoire ne doit plus être sous l’emprise des intérêts privés mais au service de l’intérêt général, du progrès pour tous et de la protection de l’environnement.

Les principales mesures consistent en la simplification de démarches administratives, la nouvelle suppression de commissions consultatives, l’accroissement du pouvoir des préfets pour faciliter des projets industriels...

 C’est un texte « fourre-tout » au service du capital, qui prône une modernisation de l’Administration tout comme la loi ESSOC
(loi n° 2018-727 du 10 août 2018, pour un État au service d’une société de confiance).

 L’un des amendements déposés par le gouvernement est la mutualisation des fonctions support (c’est à la mode !!!) de plusieurs établissements publics : agences de l’eau, parcs nationaux, établissements publics fonciers, (EPA établissements publics d’aménagement) et ports maritimes (amendement du gouvernement n° 619)

 C’est la poursuite de la déconstruction de la réglementation pernicieuse pour donner aux préfets les moyens de s’en affranchir : modifications apportées aux codes de l’environnement et au code de l’urbanisme, assouplissement des règles sur les marchés publics...

 C’est une véritable transformation et une régression du droit de l’environnement, un texte dangereux pour la biodiversité. Par la simplification des procédures applicables aux installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), les risques mal évalués donc mal maîtrisés sont nombreux.

 C’est aussi un recul de la démocratie par la suppression de concertations et par la multiplication des autorisations de légiférer par ordonnances


TEXTE N° 2750 ADOPTÉ PAR LE SÉNAT ET TRANSMIS À L’ASSEMBLÉE NATIONALE LE 6 MARS 2020 : lien direct

Il comporte comporte 5 titres (sont mentionnés les chapitres et articles correspondant aux champs du pôle ministériel) :

Titre Ier : Dispositions relatives à la suppression de commissions administratives

Titre II : Dispositions relatives à la déconcentration de décisions administratives individuelles
Insertion d’un amendement du gouvernement relatif à la mutualisation des fonctions supports pour certains établissements publics (amendement n° 619)

Titre III : Dispositions relatives à la simplification des procédures applicables aux entreprises
- Chapitre Ier : Modalités d’application des prescriptions nouvelles aux projets en cours - Article 21 et 21 (modifications Code de l’environnement)
- Chapitre II : Évaluation environnementale - Article 23 (modifications Code de l’environnement)
- Chapitre III : Modalités des consultations - Article 24, 25, 25bis, (modifications Code de l’environnement) - « Sous‑section 4 « Installations de production d’électricité à partir de l’énergie mécanique du vent »
- Chapitre IV : Exécution anticipée de travaux - Article 26, 26 bis (modifications Code de l’urbanisme et Code de l’environnement
- Chapitre VI : Modification du code de l’énergie

Titre IV : Diverses dispositions de simplification
- Article 33 - I. - 1° : Modification des dispositions du code forestier relatives à l’ONF (Office national des forêts) : voir notre article dédié "Pour la défense du service public forestier, alertons nos député-e-s !"
- Article 44 bis : Modification du code de la construction et de l’habitation (1° À la fin du 2°, les mots : « ,les organisations syndicales les plus représentatives dans le département du siège » sont supprimés ; (...))

Titre V : Dispositions portant suppression de sur transpositions de directives européennes en droit français


DISPOSITIONS QUI CONCERNENT LE DROIT DE L’ENVIRONNEMENT :

La CGT considère que c’est une transformation et une régression du droit de l’environnement

 autorisation environnementale : exécution de certains travaux de construction industrielle avant la délivrance de l’autorisation environnementale lorsque le préfet l’autorise (à la seule condition que le permis de construire ait été délivré et l’enquête publique achevée) > décideur forcément sous influence + mauvais signal envoyé aux entreprises pour

 consultations : elles sont désormais facultatives pour le CODERST (conseil départemental de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques) ou le CDNPS (commission départementale de la nature, des paysages et des sites) préalablement à certains actes administratifs pour les IPCE relevant du régime d’enregistrement ou de déclaration > vitesse et précipitation dangereuses (privation de l’avis de riverains, d’associations de l’environnement, de médecins...) + recul de la démocratie

 enquêtes publiques : réduction du champ d’application, dématérialisation possible de la procédure (pour certains IPCE, consultation du public via enquête publique ou via consultation électronique, selon décision du préfet) > régression démocratique + perte de lien social

 installations classées en cours d’instruction : mêmes délais et conditions d’entrée en vigueur des nouvelles prescriptions que pour les installations existantes > quel gain de temps si ces installations s’avèrent non conformes lorsqu’elles fonctionneront ?

 études d’impact : l’évaluation environnementale devra se faire opération par opération > impossible de mesurer l’impact global de plusieurs projets sur l’environnement


SUR L’OFFICE NATIONAL DES FORÊTS

L’avenir de la forêt publique est menacé par l’article 33 de ce projet de loi.
Les députés doivent rejeter cet article pour préserver les agents et les missions de l’Office nationale des forêts (ONF).

ALERTE ! : Trois amendements visant à supprimer cet article ou à en limiter les "dégâts" ont déjà été rejetés (voir ci-joint)

La CGT n’a pas cessé de dénoncer les conséquences dramatiques de la politique conduite depuis plus de quinze ans : plus de 50 suicides à l’ONF, un taux plus fort qu’à France Télécom (devenu Orange) rapporté à l’effectif !
L’élargissement de la possibilité de recruter des agents de droit privé pour l’exercice des missions de police de l’Office participe à l’affaiblissement de la protection des forêts. Pour la CGT, les missions de service public doivent être réalisées par des agents publics.

- Extrait de la Tribune dédiée, publiée sur le site de libération (signée notamment par La CGT Forêt) :
"A l’heure du changement climatique, les choix à faire pour les forêts et l’avenir de l’ONF méritent mieux qu’un débat tronqué au détour d’un article d’une loi de simplification administrative. Nous appelons donc les députés à rejeter les dispositions de l’article 33 du projet de loi Asap et à ouvrir un vrai débat sur les forêts avec les citoyens, les associations et les syndicats."

Documents joints